Si la figure de l'ermite est plutôt associée à l'idée d'une résidence dans un lieu reculé, voire dans une grotte, le christianisme a connu dès le Moyen Âge la pratique de l'érémitisme dans un environnement urbain ou péri-urbain. À l'époque contemporaine, le choix de mener dans ce cadre une vie solitaire de prière peut aussi être lié à la perception que l'anonymat la ville représente un environnement adéquat, même si la solitude n'est probablement plus la même quand des ermites maintiennent leur compte Facebook et leur profil Twitter, à l'image de Rachel Denton (Diocèse de Nottingham). L'ermite qui entend poursuivre sa vocation dans le cadre catholique doit respecter certaines règles, à commencer par une démarche de discernement, et recevoir l'approbation de l'évêque du diocèse dans lequel il élit résidence. Selon l'article 603 du Code de droit canonique actuellement en vigueur (1983), « l'Église reconnaît la vie érémitique ou anachorétique, par laquelle des fidèles vouent leur vie à la louange de Dieu et au salut du monde dans un retrait plus strict du monde, dans le silence de la solitude, dans la prière assidue et la pénitence. L'ermite est reconnu par le droit comme dédié à Dieu dans la vie consacrée, s'il fait profession publique des trois conseils évangéliques scellés par un voeu ou par un autre lien sacré entre les mains de l'Évêque diocésain, et s'il garde, sous la conduite de ce dernier, son propre programme de vie. »
Le supplément Société du journal dominical NZZ am Sonntag (30 juillet 2017) a consacré un article à une ermite urbaine florentine. Cet article de Marc Zollinger témoigne de la curiosité que suscite régulièrement ce mode de vie dans les médias ; chaque année, on peut trouver des portraits d'ermites dans des journaux ou magazines de plusieurs pays européens. Selon un article publié il y a quinze ans dans une revue catholique, l'Italie comptait alors entre 1.000 et 1.200 ermites, répartis de façon à peu près égale entre hommes et femmes, et leur âge se situait souvent entre 50 et 60 ans, très rares étant ceux de moins de 30 ans. L'article notait déjà qu'ils résidaient en majorité « au milieu de nous », dans des villes (Giandomenico Mucci, « I nuovi eremiti », La Civiltà cattolica, N° 3657, 2 novembre 2002, pp. 256-262). L'article de Zollinger donne une estimation actuelle d'au moins 1.200 ermites urbains en Italie. Il cite les travaux du sociologue Isacco Turina (Université de Bologne), qui a consacré il y a plusieurs années déjà un livre au « nouveaux ermites », fondé sur plus de 37 entretiens et indiquant qu'il s'agirait en majorité de femmes, dont la moyenne d'âge serait de 55 ans. Le début d'une nouvelle vague d'érémitisme en Italie remonterait à la fin du XXe siècle, selon les observations de Turina. (JFM)
Isacco Turina, I nuovi eremiti. La ‘fuga mundi’ nell’Italia di oggi, San Giorgio a Cremano, Medusa, 2014 (éd. originale 2007).
Un blog en italien sur les nouveaux ermites: www.nuovieremiti.blogspot.com.
Il y a près de trente ans était paru un livre-reportage en français, sous la plume d’un sociologue et d’un journaliste, pour partir à la rencontre des ermites français, prenant acte de l’essor de ce mode de vie religieuse (de 20 ermites en France en 1960 à 300 en 1980): Serge Bonnet et Bernard Gouley, Les Ermites, Paris, Fayard, 1980.
Plusieurs livres récents de Luc Mauger sont consacrés aux ermites contemporains, mais nous n’en avons pas encore l’occasion d’en prendre connaissance au moment où sont rédigées ces lignes.