Lors de la séance du Saint Synode du 13 mai 2017, l'Église orthodoxe ukrainienne - Patriarcat de Kyiv a décidé d'établir un exarchat européen, confié à l'Archevêque Hilarion (Protsyk) de Rivne et Ostrog, qui se trouve par ailleurs à la tête de l'administration des affaires extérieures du Patriarcat (RISU, 14 mai 2017). Lors de la même séance, l'établissement d'un exarchat russe (couvrant la Russie dans ses frontières internationalement reconnues) a également été décidée, sous la direction du Métropolite Ioasaf (Shibaev) de Belgorod et Oboyan (RISU, 14 mai 2017). Le Patriarcat de Kyiv compterait 44 paroisses en Europe : 2 aux Pays-Bas, 1 en Hongrie, 8 en Italie, 6 en France, 5 en Suède, 6 en Allemagne, 3 en Espagne, 5 au Portugal, 1 en République tchèque, 1 au Royaume-Uni, 1 en Lituanie, 1 en Finlande, 1 en Autriche, 1 en Slovénie, 1 en Grèce et 1 en Suisse. En France, rappelle l'article, une petite Éparchie orthodoxe de Paris et de toute la France est dirigée par le Métropolite Michel (Laroche), qui avait été ordonné prêtre de l'Église catholique orthodoxe de France (ECOF) en 1969 et avait rejoint le Patriarcat de Kyiv dans les années 1990, après un passage de quelques années dans un groupe vieux-calendariste et une temporaire réintégration dans le Patriarcat de Roumanie. Cette éparchie compte une demi-douzaine de communautés, selon son propre site, et sera intégrée dans le nouvel exarchat.
L'organisation de ses activités à l'étranger s'inscrit dans la ligne des efforts du Patriarcat de Kyiv pour s'affirmer dans un monde orthodoxe où il n'est pas reconnu. Comme l'avait rappelé un article publié en 2011 par Religioscope, les fidèles orthodoxes en Ukraine se divisent en trois courants : ceux qui suivent l'Église ukrainienne rattachée au Patriarcat de Moscou (avec un statut autonome) resteraient les plus nombreux, dans la seule juridiction officiellement reconnue par les autres patriarcats orthodoxes ; l'Église orthodoxe ukrainienne - Patriarcat de Kyiv vient ensuite, suivie par la beaucoup plus petite Église orthodoxe autocéphale ukrainienne (surtout présente dans la partie occidentale du pays). Certaines sources ukrainiennes suggèrent que, à la suite des événements politiques et des conflits survenus en Ukraine ces dernières années, un nombre croissant d'orthodoxes auraient transféré leur allégeance au Patriarcat de Kyiv, mais ces chiffres restent invérifiables, faute d'enquête de terrain indépendante à notre connaissance ; ils doivent être pris avec prudence dans un environnement aussi marqué par des propagandes rivales. Le simple nombre de paroisses ne constitue pas un indicateur suffisant sans connaître le nombre de leurs fidèles. Le Patriarcat de Kyiv a misé sur le sentiment national ukrainien et sur l'existence d'une Église indépendante unie comme expression de la nation ukrainienne (avec le soutien de milieux politiques dans ce sens) ainsi que sur l'espoir d'une reconnaissance par le Patriarcat de Constantinople (sans succès sur ce dernier point). Il entretient ou a entretenu des relations avec des groupes orthodoxes dissidents en Bulgarie et au Monténégro, mais de tels partenaires mineurs ne pouvaient lui offrir un appui sérieux pour gagner une stature internationale. Les récents efforts pour développer son organisation à l'étranger révèlent sans doute aussi l'aspiration à créer une réalité ecclésiale qui parviendrait dans la durée à se faire accepter, même si une telle issue reste incertaine dans la configuration actuelle du monde orthodoxe. Au fil des transformations politiques, l'éventualité d'une réunion des différentes composantes orthodoxes ukrainiennes en une seule entité représente cependant une possibilité à long terme. Autant que des considérations canoniques, les évolutions politiques respectives de l'Ukraine et de la Russie pèseront dans ces processus.