Parmi les articles les plus régulièrement consultés sur le site Religioscope au cours des derniers mois figure le reportage rédigé en 2012 par Denise Favre-Chatagny sur une nouvelle pratique de guérison à Madagascar, le « captage ». Technique musulmane d'apparition récente (en 2005, et arrivée à Madagascar en 2011), mais loin d'être acceptée par tous les musulmans, cette pratique est ancrée dans la tradition de la roqya, qui recourt à la récitation du Coran dans des buts thérapeutiques. Pour en savoir plus, signalons que Denise Favre-Chatagny vient de publier un livre intitulé Le Captage à Madagascar. Ce livre ne parle pas seulement de cette pratique, mais la situe dans le cadre des croyances et autres méthodes de guérison rencontrées sur cette île : dans la société malgache, la croyance à la sorcellerie et aux influences du monde invisible marque les pratiques thérapeutiques. Elle évoque aussi la présence musulmane (environ 7 % de la population malgache). Des troubles de santé sont supposés provoquées par les djinns. Un imam pratiquant le captage, dont la chercheuse a observé les activités, inscrit sa démarche dans la lutte contre la sorcellerie, en contraste avec d'autres pratiques qui voudraient défaire la sorcellerie par une autre sorcellerie : « Nous, on soigne par le Coran, on attaque la sorcellerie. » (p. 166) Bien que clairement identifié comme musulman, et même si l'un des objectifs de la roqya est de prêcher l'islam, le captage attire en majorité à Madagascar des non musulmans (90 % des personnes rencontrées par la chercheuse) : des chrétiens et même des agnostiques viennent y chercher la solution de leurs problèmes. Les références aux djinns et les prières à Allah ne gênent pas les patients chrétiens. Un patient protestant explique : « Les djinns ne sont pas que dans le monde musulman, on est tous sur la même terre, donc ils sont aussi dans le monde chrétien. » (p. 179) La roqya et le captage sont aussi pratiqués aujourd'hui en Europe : nous attendons avec curiosité les futures recherches de Denise Favre-Chatagny sur leur public et leur écho dans cet autre contexte culturel et religieux.
Denise Favre-Chatagny, Le Captage à Madagascar : guérir par le verbe, Paris, L’Harmattan, 2016 (252 p.).
On trouve en ligne plusieurs sites proposant des services de roqya et de captage de djinns ainsi que des critiques musulmanes de ces pratiques. Le principal promoteur de la technique du captage sur le plan international est le très actif et très mobile Ben Halima Abderraouf. « Capter les djinns consiste à les amener de force dans le corps d’une personne dénommée le capteur; le djinn parle alors instantanément et il est notre prisonnier, nous pouvons faire ce que nous voulons de lui », explique-t-il au début de cet article exposant ce qu’est le captage:
http://www.benhalimaabderraouf.fr/index.php/fr/la-roqya/le-captage