Eglises d'Asie, 16 mars 2007 -- Le sondage a été réalisé auprès de 1.097 protestants qui ont accepté de répondre à un questionnaire, proposé à la sortie du temple, après les services cultuels du mercredi et du dimanche. Il présente sans doute le défaut de surpondérer les opinions des protestants qui pratiquent et qui s'intéressent à la chose politique.
Dans la campagne électorale pour les présidentielles, deux principaux candidats, issus du même parti, se disputent la faveur de l'électorat sud-coréen et tous deux présentent la particularité d'être chrétiens, dans un pays où les catholiques et les protestants forment, respectivement, 10,9% et 18,3% de la population. Il s'agit de l'ancien maire de Séoul, le protestant Lee Myung-bak, crédité par un sondage du 18 février dernier de 48% des intentions de vote, et de la catholique Juliana Park Geun-hye, la fille du général et ancien dictateur Park Jung-hee, avec 18% des intentions de vote.
Né le 19 décembre 1941, Lee Myung-bak a été maire de Séoul de juillet 2002 à juin 2006 ; membre du Grand Parti National (conservateur), il est connu pour être partisan d'une ligne dure dans les relations avec la Corée du Nord. Née en février 1952, Juliana Park Geun-hye préside le Grand parti national, la principale force de l'opposition à l'actuel président Roh Moo-hyun; lors de la campagne pour les élections locales du 31 mai 2006, Juliana Park a été blessée au visage par un déséquilibré, membre du parti Uri, créant un élan de sympathie en faveur du Grand parti national qui a largement remporté ce scrutin. Ce parti national contrôle 127 des 296 sièges de l'Assemblée nationale. Juliana Park a été baptisée lorsqu'elle était écolière dans un collège catholique, même si, aujourd'hui, elle ne déclare pas d'appartenance religieuse.
A ce stade de la campagne électorale, il est trop tôt pour définir une liste complète des candidats à la succession du président Roh, mais il est probable que d'autres chrétiens se présenteront. Lors des dernières élections présidentielles, en décembre 2002, on comptait trois catholiques - dont Roh Moo-hyun -, un protestant, un bouddhiste et deux candidats ne se réclamant d'aucune religion. Depuis de nombreuses années, on constate une surreprésentation des chrétiens en politique - relativement au poids des communautés chrétiennes dans la population coréenne. Ainsi, à l'Assemblée nationale, le pourcentage des députés qui sont catholiques atteint les 24 %.
Selon des statistiques gouvernementales de 2006, les bouddhistes représentent 22,8 % de la population, les protestants 18,3 % et les catholiques 10,9 %. 40 % des Sud-Coréens ne déclarent pas d'appartenance religieuse, le reliquat se répartissant entre diverses petites communautés religieuses.
En décembre 2002, Justo Roh Moo-hyon, baptisé dans la religion catholique à l'âge de 40 ans mais déclarant dans la vie publique vouloir maintenir dans la discrétion cet aspect de sa vie, était sorti vainqueur des urnes, face à un autre catholique, Olaf Lee Hoi-chang. En 1997, Thomas More Kim Dae-jung, un autre catholique, avait battu le même Lee. Et, en 1992, c'était le protestant Kim Young-sam qui avait battu Kim Dae-jung.
Selon l'Association Nationale Coréenne des Pasteurs Protestants (KACP), les électeurs protestants, au moment de glisser leur bulletin de vote dans l'urne, favorisent les hommes - et les femmes - politiques susceptibles de défendre les valeurs chrétiennes dans la vie de la nation, mais ils ne souhaitent pas pour autant voir les Eglises protestantes en tant que telles et leurs pasteurs s'immiscer dans l'arène politique. Pour le Rév. Lee Sang-hwa, secrétaire général de l'Association, ce sondage a été commandé parce que «nous estimons nécessaire et avisé à ce stade de la campagne électorale de connaître l'attitude des chrétiens en politique». Il ajoute que, selon lui, trop nombreuses sont les dénominations protestantes à avoir sacrifié toute objectivité politique au profit d'un engagement politique marqué. Que ce soit sur des sujets tels que la politique à mener face à la Corée du Nord ou la présence des forces armées américaines dans le pays, les Eglises protestantes se sont divisées selon un clivage conservateur-progressiste, précise-t-il encore.
Le sondage indique que seulement un dixième des protestants estiment que les chrétiens, par principe, ne devraient pas être engagés en politique. Pour les quatre-vingt-dix autres pour cent, une moitié se prononcent pour un engagement actif des chrétiens en politique et une autre moitié estime qu'être chrétien ne change rien à la façon dont les hommes politiques se comportent. Ce dernier point rejoint des analyses menées par le passé, selon lesquelles les croyances religieuses du personnel politique ne sont pas fondamentalement significatives, dans la mesure où, une fois élus, les hommes politiques tendent à ignorer la religion.
Invité à commenter les résultats de ce sondage, le P. Hugo Park Jung-woo, secrétaire du Comité 'Justice et Paix' de l'épiscopat catholique sud-coréen, a déclaré que l'appartenance religieuse d'un ou d'une candidat(e) à la présidence de la République ne doit pas être le facteur décisif du choix. «Toutefois, en tant que chrétien, nous pouvons comparer les candidats en considérant leurs compétences et leur aptitude à servir les gens en se fondant sur la justice de Dieu», a-t-il ajouté. Quant aux Eglises, il est clair qu'elles ne doivent pas s'ingérer en politique, mais, du fait que «la politique influence profondément nos vies quotidiennes, il est légitime que les chrétiens s'engagent en politique, notamment lorsque les décisions à prendre correspondent ou ne correspondent pas à notre sens de la morale et du bien commun».
Cet article a été publié dans le N° 459 (16 mars 2007) d’Eglises d’Asie, Agence d’Information des Missions Etrangères de Paris (128 rue du Bac, 75341 Paris Cedex 07).
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