Cette étude n'est pas simplement le fruit d'un intérêt académique, puisqu'elle est produite par le centre de recherche du très actif Council on American-Islamic Relations (CAIR). Au cours des dernières années, le CAIR dit avoir reçu de nombreux messages de personnes qui se plaignaient de difficultés liées à leurs convictions religieuses au moment de l'établissement d'un permis de conduire.
Les problèmes, souligne le rapport, ne touchent cependant pas seulement des musulmans et les femmes qui ne souhaitent pas montrer leur chevelure. Il existe des groupes chrétiens qui refusent par principe d'être photographiés. Les sikhs portent un turban lié à leur appartenance religieuse.
Il ressort de l'enquête que les pratiques ne sont pas unitaires. Sur la question de la tête couverte, quelques Etats américains considèrent un couvre-chef religieux comme une variation normale et reconnue, dont il faut simplement tenir compte. La plupart des Etats consentent des exceptions pour motifs religieux. Quatre Etats, enfin, n'ont aucune réglementation à ce sujet (Georgie, Kansas, Kentucky, New Hampshire).
L'objection à être photographiée est admise dans 13 Etats, qui établissent un permis de conduire sans photographie pour ceux qui ont une raison religieuse de refuser une autre solution. Trois Etats refusent en revanche cette possibilité (Californie, Caroline du Nord et Caroline du Sud), tandis que les autres n'ont adopté aucune réglementation.
Certaines femmes musulmanes insistent cependant non seulement pour se couvrir la tête, mais aussi pour se voiler la face au nom de leur foi. 22 Etats refusent d'accepter une photographie d'une personne au visage voilé. 19 Etats n'ont aucune règle écrite à ce sujet. Enfin, 9 Etats offrent certains assouplissements, qu'il s'agisse - dans de rares cas - d'une photographie d'un visage voilé, ou d'un permis sans photographie, ou encore d'autres variantes.
A noter que peu d'Etats se livrent à une vérification des croyances invoquées. Dans la plupart des cas, on se contente de la déclaration de l'intéressé(e).
Les événements du 11 septembre 2001 ont eu un impact sur la pratique administrative: au nom des impératifs de sécurité, trois Etats ont mis un terme à la possibilité d'obtenir un permis sans photographie et deux Etats demandent une vérification écrite. En revanche, c'est aussi dans la foulée de ces événements que six Etats ont introduit des dispositions autorisant le port d'un couvre-chef pour des raisons religieuses. Contrairement à ce qui a parfois été prétendu, toutes les évolutions ne sont donc pas allées dans le sens d'un durcissement.
Conclusion du rapport: dans l'ensemble, une réelle tolérance se manifeste sur la question de la tête couverte - peut-être aussi parce que la chevelure (qui peut être coupée, teinte, etc.) ne constitue pas un élément crucial d'identification.
Le rapport conclut en s'interrogeant sur les possibilités ouvertes par le développement de nouvelles technologies pour permettre d'exempter des détenteurs du permis d'être photographiés: par exemple, l'insertion d'empreintes digitales dans le permis, à l'heure où les détecteurs portables d'empreintes digitales commencent à se répandre.
Religious Accommodation in Driver’s License Photographs: A review of codes, policies and practices in the 50 states, Washington, CAIR, 2004. Ce document d’une quinzaine de pages peut être obtenu au format PDF sur le site du CAIR. Outre la synthèse initiale, le rapport contient un résumé de la situation dans chacun des 50 Etats.
Lien pour télécharger le rapport:
http://www.cair-net.org/downloads/driversphoto.pdf