Cheikh Boureïma Abdou Daouda, ex-étudiant de la Faculté de Médecine à l'Université Nationale de Niamey (Niger) et diplômé de l'Université Islamique de Médine (Arabie Saoudite), auteur de plusieurs ouvrages sur l'islam publié en français, est président-fondateur du Bureau des Traductions Islamiques, Directeur du Complexe Islamique Privé Daroul-Khayrriya, Imam de vendredi à l'Université de Niamey.
Islamiya.net - Novembre 2002 - Louanges à Allah Seigneur de l’Univers, que la prière et le salut d’Allah soient sur notre Prophète et Guide Mouhammad, sur sa sainte famille et ses fidèles Compagnons!
Les évènements combien tristes et déplorables qui se sont passés au Nigeria ces derniers temps suscitent en moi une réaction de condamnation de toutes les parties concernées à savoir les organisateurs du concours de Miss Monde, les autorités nigérianes, la presse locale et les musulmans.
En effet, l’organisation de ce concours de Miss Monde en plein Ramadan est une provocation pure et simple des musulmans quand on sait les circonstances d’exhibition de la beauté voire de nudité dans lesquelles les concours de beauté se passent généralement.
Il n’y a pas de doute que cela suscite un sentiment de frustration et de réaction chez les musulmans.
Ainsi, pour moi, les organisateurs de ce concours sont les premiers responsables de ces évènements malheureux dans lesquels plus de deux cents personnes ont perdu la vie.
Quant aux autorités nationales, on peut leur reprocher leur indifférence affichée face aux problèmes touchant la communauté musulmane sinon comment peuvent-elles autoriser la tenue de ce concours de beauté en plein mois de Ramadan alors qu’elles connaissent parfaitement la mentalité des musulmans de ce pays?
On peut leur reprocher également le recours à des solutions toujours curatives voire répressives pour contenir des mouvements sociaux au lieu de prendre des mesures préventives et pourtant, ces évènements étaient bien prévisibles. Pour moi, les autorités occupent la deuxième place dans la responsabilité de ce qui s’est passé.
Quant à la presse locale, c’est elle qui a mis le feu à la poudre à travers les propos blasphématoires de la journaliste Isioma Daniel du quotidien This Day.
Elle est directement responsable des évènements survenus et ceci doit interpeller tous ceux qui oeuvrent dans les médias à bien mesurer la portée et le danger de leurs propos et à être prêts à subir les conséquences de leurs comportements.
Au lieu de faire jouer à la plume son rôle d’information, de sensibilisation, d’orientation et d’unification des gens, la majorité de ceux qui usent de cet instrument, en ont fait aujourd’hui un facteur de haine mutuelle et de division sociale.
Quant aux musulmans de Kaduna, bien que l’organisation du concours de Miss Monde dans ce mois de Ramadan soit une provocation pour eux et bien que l’article de la journaliste soit un blasphème pour toute la Oummah Islamique, je leur reproche leur manque de vigilance, d’analyse et de prévision et surtout leur transgression dans la réaction à cette provocation.
Je pense que le problème était entre les organisateurs du concours et les musulmans mais je ne vois pas comment il est devenu inter- religieux, entre chrétiens et musulmans?
C’est dans pareilles circonstances que les musulmans partout et toujours doivent faire preuve de temporisation, d’analyse et de clairvoyance sinon ils joueront le jeu de leurs ennemis au détriment de leurs sociétés et au détriment des principes de symbiose, de bonne cohabitation, d’unité, de fraternité, de tolérance… tant prônés par leur religion.
Quand un bédouin vint uriner dans la mosquée du Prophète alors que ce dernier y était assis avec ses Compagnons, ces derniers voulurent se ruer sur ce profanateur pour lui infliger une leçon inoubliable mais le Prophète leur intima l’ordre de le laisser finir son urine blasphématoire et d’y verser de l’eau après.
Il appela ensuite le bédouin et lui expliqua dans la douceur le rôle d’une mosquée (qui n’est pas un lieu de toilette) et les actes qui doivent y être accomplis.
A la fin le bédouin embrassa l’Islam…
Voilà comment le Prophète nous enseigne la réaction à adopter dans certaines circonstances de provocation, ce qui nous évitera de regretter et d’endosser des responsabilités que nous ne pouvons pas supporter car «Si précipitation et impatience font ensemble un enfant, il s’appellera regret» et «Ce sont deux personnes qui cassent une calebasse» dit un dicton africain.
Quant à la fatwa prononcée par les responsables de l'Etat de Zamfara appelant à la mort de la journaliste Isioma Daniel, je ne connais pas les attributions de cette instance pour juger de l’efficacité ou de l’inefficacité de cette sentence.
Dans la mesure où le problème a pris une ampleur et une dimension nationales, je pense que seule l’Autorité Fédérale peut décider du sort de cette journaliste qui doit dans tous les cas répondre de son acte devant la justice humaine et/ou divine.
Cheikh Boureima Abdou Daouda
Ce document a été publié sur un très actif site islamique en langue française, islamiya.net [ce site n'existe plus - 23.08.2016].
C'est le texte intégral publié sur ce site que nous reproduisons ici.