Le 24 septembre 2002, le temple d'Akshardham, à Gandhinagar (Gujarat), était attaqué par deux hommes qui ouvrirent le feu sur la foule. Il fallut aux forces de police plusieurs heures pour venir à bout des attaquants. Plus de 30 morts furent dénombrés parmi les fidèles venus prier dans le temple. A la suite de ce tragique incident, les autorités de l'Orissa ont décidé de mettre en place différentes mesures de protection du temple de Jagannath à Puri (Orissa), un très important lieu de pèlerinage. Parmi ces mesures figure l'installation d'un système de vidéosurveillance.
Terrorisme.net - 12 octobre 2002 - Les attaques contre des lieux de culte causent toujours une forte impression. Elle met en contraste un groupe humain rassemblé pour une activité en principe pacifique, sans défense, et des assaillants qui n'hésitent pas à introduire la violence et la mort dans un espace tenu pour sacré. L'on se souvient de la tuerie commise au Caveau de Patriarches, à Hébron, par Baruch Goldstein le matin du 25 février 1994. Dans le sous-continent indien, les médias ont rapporté à plusieurs reprises, ces derniers mois, des attentats contre des églises au Pakistan; mais des lieux de culte chiites ont parfois aussi été la cible de militants antichiites.
L'affaire du 24 septembre 2002 a profondément choqué l'Inde, d'autant plus qu'elle se produisait dans un Gujarat encore fortement marqué par les émeutes de février-mars 2002, au cours desquelles plus d'un millier de musulmans auraient trouvé la mort. Les assaillants auraient d'ailleurs explicitement présenté leur action comme une réplique à ces événements: une lettre retrouvée sur eux affirmait qu'ils appartenaient au Tereek-e-Kasas (Mouvement pour la revanche, organisation jusqu'à maintenant inconnue et qui n'est peut-être qu'un nom choisi pour la circonstance); le même document expliquait, selon des sources policières indiennes, que les terroristes auraient mené cette opération parce qu'ils ne pouvaient pas tolérer ce qui s'était produit durant les émeutes du Gujarat.
Le temple d'Akshardham appartient au mouvement Swaminarayan, un important et prospère courant de réforme de l'hindouisme contemporain, apparu au 19e siècle au Gujarat et dont l'implantation est particulièrement forte dans cette région. Le mouvement fut fondé par Shajanand Swami, également appelé Swaminarayan (1781-1830); la plupart des membres du mouvement considèrent le fondateur comme la suprême manifestation divine. Le groupe a acquis une visibilité depuis quelques années dans la diaspora hindoue, même aux yeux du grand public, en construisant de superbes temples non seulement en Inde, mais également en dehors de l'Inde, notamment le temple de Neasden, dans une banlieue de Londres.
Le 24 septembre 2002, les deux terroristes sont arrivés à 16h45 aux portes du temple d'Akshardham. N'ayant pas pu entrer par l'une des portes, parce que les gardes s'apprêtaient à les arrêter pour un contrôle de sécurité, ils sautèrent par dessus la barrière et se précipitèrent vers la principale voie d'accès au temple, tout en ouvrant le feu sur les touristes et pèlerins présents. Avant d'avoir atteint le sanctuaire proprement dit, ils jetèrent également des grenades. Mais les volontaires présents pour encadrer les visiteurs réussirent à avertir par interphone des personnes présentes dans le sanctuaire, qui parvinrent à en fermer les lourdes portes et à se barricader à l'intérieur du sanctuaire peu avant que les terroristes ne parviennent à l'atteindre. Les assaillants se rabattirent donc sur des salles d'exposition. A 16h50, l'attaque avait déjà causé 20 morts au moins; d'autres victimes, blessées, allaient mourir par la suite. Puis les attaquants se replièrent - apparemment tout d'abord sur le toit, mais les informations sont contradictoires. Tout s'était passé en moins de dix minutes.
Les forces de sécurité durent tout d'abord évacuer les nombreuses personnes bloquées sur le site, tout en essuyant des coups de feu. Des unités antiterroristes arrivèrent de Delhi dans la soirée et, après une évaluation des possibilités tactiques, prirent position dans la nuit sur le site du temple. La farouche résistance des deux hommes - l'un des membres des commandos antiterroristes fut tué et un autre gravement blessé - entraîna la décision d'attendre l'aube pour en finir. Les deux terroristes auraient finalement été tués vers 6h45 le matin du 26 septembre.
A noter que, selon plusieurs témoignages recueillis par les médias indiens, les assaillants auraient agi de façon déterminée - calmement et méthodiquement. Comme toujours dans de tels cas, des doigts accusateurs ont été pointés vers le voisin pakistanais. Il ne semble cependant pas que l'on dispose pour l'instant d'éléments concluants quant aux soutiens dont auraient bénéficié les attaquants.
Le 7 octobre 2002, le temple a été réouvert officiellement. Une cérémonie s'y est déroulée pour y ramener une atmosphère de paix. Par ailleurs, de sérieuses mesures de sécurité ont été mises en place: tout visiteur doit passer par un portail détecteur de métaux et se soumettre à une fouille.
Mais les événements du 24 septembre ont amené les responsables d'autres lieux de pèlerinage importants à s'interroger sur les risques et mesures de sécurité à mettre en oeuvre pour les prévenir.
C'est ainsi que les autorités de l'Orissa, dans l'Est de l'Inde, ont décidé de mettre en place différentes mesures au célèbre temple de Jagannath, à Puri, que visitent 1,5 millions de visiteurs chaque année. Selon les services de lutte contre le terrorisme, le temple offrirait en effet une cible idéale: l'espace est limité et le temple est entouré d'immeubles assez élevés. Des gardes armés prendront donc position dans le complexe, le temple sera éclairé et un système de vidéosurveillance permettra de suivre en permanence les mouvements des visiteurs.
Sur le mouvement Swaminarayan, il existe un bon ouvrage introductif en anglais, par un professeur d'université américain, Raymond Brady Williams: An Introduction to Swaminarayan Hinduism (2001).
Cet article a tout d’abord été publié sur terrorisme.net, un site créé au mois d’août 2002 et visant à fournir des informations et analyses sérieuses sur les questions relatives au terrorisme.