Les sept femmes ordonnées le 29 juin 2002 par un évêque indépendant ont officiellement été excommuniées le 5 août, par décret de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi. Mais l'acte du mois de juin suscite d'autres turbulences, notamment l'intervention de l'Eglise catholique romaine en Allemagne contre un éditeur.
Sur l'arrière-plan de cette affaire, lire notre précédent article.
L'excommunication n'a rien d'une surprise: elle était la conséquence prévisible de l'acte délibérément provocateur du 29 juin 2002. Comme on s'y attendait, aucune des sept femmes n'a exprimé le repentir auquel Rome les avait invitées.
Signé par le Cardinal Ratzinger, le texte publié par la Congrégation est bref. Une remarquable préalable rappelle que l'évêque consécrateur, schismatique, se trouvait déjà excommunié ipso facto. S'exprimant le 6 août sur les ondes de Radio Vatican, Mgr Tarcisio Bertone a qualifié les ordinations d'acte public attaquant "la structure fondamentale de l'Eglise". Il a en outre dénoncé la publicité autour des ces ordinations (Associated Press, 6 août 2002).
De façon tout aussi prévisible, les excommuniées ont déclaré n'avoir pas l'intention de tenir compte de la sentence et considèrent cette réaction "disproportionnée" comme un "acte de discrimination envers les femmes", a déclaré Christine Mayr-Lumetzberger à l'AFP. Elle afirme avoir l'intention d'assumer son "service pastoral" sans entraves, elle aurait notamment déjà été invitée à célébrer des mariages.
Dans un communiqué publié le jour même du décret, les sept femmes reconnaissent avoir enfreint le code de droit canon interdisant l'ordination des femmes, mais cet article "est une offense contre l'égalité entre homme et femme proclamée par Dieu", estiment-elles (ENI, 6 août 2002).
Même s'il avait pris ses distances par rapport aux ordinations, le mouvement catholique contestataire Wir sind Kirche ("Nous sommes aussi l'Eglise") a critiqué l'excommunication dans un communiqué du 6 août [contrairement à d'autres communiqués de presse de la même année, celui-ci ne semble plus se trouver sur le site, URL d'origine: https://www.wir-sind-kirche.de/wsk/presse/p2002/presse_19.htm - 26.08.2016]: il y voit le témoignage d'un "climat répressif" et d'un refus d'une adaptation pastorale face aux attentes - selon eux - d'une majorité de catholiques.
Parmi les turbulences autour de cette affaire, notons aussi l'action en justice de l'Archevêché de Munich contre l'éditeur Patmos-Verlag (Dusseldorf), qui a publié à l'occasion des ordinations un livre intitulé "Wir sind Priesterinnen". Motif de cette intervention: l'Archevêché entend interdire à l'éditeur de prétendre que les femmes auraient été ordonnées par un évêque catholique romain - la désignation "catholique romaine" étant légalement protégée.
Le 25 juillet 2002, un tribunal de Munich a donné raison à l'Archevêché. L'éditeur doit assumer les frais de la procédure (50.000 Euros) et s'expose à une amende pouvant aller jusqu'à 250.000 Euros s'il continue de propager ces affirmations. Le 30 juillet, Patmos-Verlag a provisoirement suspendu la diffusion du livre.
Enfin, en Grande-Bretagne, une théologienne catholique romaine du nom d'Elizabeth Stuart, qui enseigne dans un collège anglican, déjà ordonnée par Jonathan Blake, un ancien vicaire anglican devenu évêque indépendant et fondateur d'une Open Episcopal Church, a annoncé que celui-ci allait prochainement la consacrer comme femme-évêque. Elizabeth Stuart avait déjà provoqué une controverse en 1992, en publiant un recueil de prières pour chrétiens homosexuels (The Times, 3 août 2002).
Jean-François Mayer