- Tensions autour d'Ayodhya
- Ecoles coraniques en Somalie
- Ouganda et Organisation de la Conférence Islamique
- Bouddhas de Bamiyan: il ne reste rien
- Vatican et Russie: Rome durcit le ton
- Eglise orthodoxe dans l'Antarctique
- Hindous et catholiques à l'île Maurice
- Catholiques et francs-maçons: un évêque dit non
- Intérêt pour l'islam aux Etats-Unis
- Avenir de l'Eglise anglicane: primat non anglais?
- Islamistes condamnés en Libye
- Foulard islamique à Singapour
- Arabie saoudite et propagation de l'islam
- Statistiques religieuses de la Suisse
La controverse autour d'Ayodhya cause de nouvelles commotions en Inde, après le massacre de 58 hindous qui revenaient d'Ayodhya dans un train à Godhra (Gujarat) le 27 février 2002. De nombreux hindous s'étaient rassemblés les jours précédents à Ayodhya pour un rituel préludant à la construction d'un temple sur le site de la mosquée détruite en 1992 (et elle-même construite au 16e siècle sur le site d'un temple hindou). Des représailles contre des musulmans se sont produites à travers le Gujarat et ont déjà fait plusieurs centaines de morts. Un regain de tension autour d'Ayodhya était prévisible, comme nous l'indiquions au mois de janvier dans la rétrospective de l'actualité des religions de l'année 2001. L'actualité évoluant d'heure en heure, nous ne tenterons pas de la résumer dans ces lignes. Le premier ministre Atal Behari Vajpayee avait déclaré le 26 février 2002 que le gouvernement ne tolérerait pas la construction d'un temple tant que les tribunaux n'auraient pas pris une décision à ce sujet. Mais des groupes activistes hindous annoncent depuis plusieurs mois que la construction commencera le 15 mars 2002, quoi qu'il arrive. L'Acharya Giriraj Kishore, l'un des dirigeants du Vishva Hindu Parishad (VHP), l'a encore réaffirmé dans un entretien avec Rediff (6 février 2002): "Le VHP a attendu assez longtemps. Notre patience est maintenant à bout." Quant aux tribunaux, "ils ne sont pas compétents pour décider sur des questions de foi." L'affaire est compliquée par les liens antre activistes hindous et responsables du BJP, le principal partenaire de l'actuelle coalition au pouvoir. Cela pourrait renforcer des tensions entre nationalistes hindous partisans d'une ligne dure et ceux disposés à consentir des compromis politiques. Le 2 mars 2002, les responsables du Rashtriya Swayamsevak Sangh (RSS), fer de lance du nationalisme hindou, ont rencontré le Premier ministre et semblaient optimistes quant à une issue à la crise (Rediff, 3 mars 2002). Mais le 3 mars, les dirigeants du VHP ont annoncé qu'ils entendaient s'en tenir à leur calendrier (Rediff, 3 mars 2002). Reste à voir qui cédera le premier dans ce bras de fer. L'affaire ne va pas non plus contribuer à atténuer la méfiance envers le Pakistan: comme toujours dans de telles circonstances, les milieux nationalistes hindous ont été prompts à soupçonner les services de renseignements pakistanais, l'ISI, d'avoir joué un rôle dans l'éclatement des troubles.
Le rôle possible des écoles coraniques en Somalie comme terreau d'un futur activisme islamiste continue de préoccuper certains observateurs américains, relève le Philadelphia Inquirer (1er mars 2002). Le Département d'Etat américain se dit inquiet. Les enseignants de ces écoles démentent toute inclination extrémiste, même si certains élèves ne cachent pas leur admiration pour Ousama Ben Laden - peut-être plus comme figure d'un "Che Guevara" musulman séduisant aux yeux d'adolescents que comme référence idéologique, d'ailleurs. Quoi qu'il en soit, l'existence de ces écoles doit également être placée dans le contexte de l'effondrement du système scolaire somalien au cours de la guerre civile qui a ravagé le pays. Un autre problème découle du manque d'aide étrangère qui parvient au pays. Le représentant du Programme de développement des Nations Unies en Somalie souligne la nécessité de se soucier du long terme: "Si vous êtes réellement préoccupés par les groupes radicaux, le problème ne se présente pas maintenant, mais dans trente ans", a-t-il déclaré au quotidien de Philadelphie.
L'Ouganda doit-il rester membre de l'Organisation de la Conférence Islamique? Le débat a été lancé par la demande des évêques de l'Eglise de l'Ouganda (anglicane), au début du mois de février 2002, pour que l'Ouganda se retire de l'organisation, à laquelle il avait adhéré en 1974, à l'époque du gouvernement d'Idi Amin Dada (musulman peu pratiquant, mais dont le sentiment d'appartenance à l'islam s'était ranimé après un voyage en Libye en 1972; il vit aujourd'hui en exil en Arabie saoudite). Les évêques anglicans s'étaient déclarés préoccupés de voir leur pays, en principe Etat séculier, continuer d'être membre de cette organisation. Par la même occasion, ils avaient exprimé des réserves quant aux bonnes relations qu'entretiendrait le président Yoweri Museveni avec le colonel Kadhafi (Libye). L'initiative des évêques a entraîné de vives protestations de la part de dirigeants musulmans ougandais. Le quotidien de Kampala New Vision (27 février 2002) indique que 6% des Ougandais étaient musulmans au moment de la conversion d'Idi Amin; certains se convertirent alors pour jouir des faveurs présidentielles, mais retournèrent parfois à leur religion d'origine au moment de la chute du régime d'Amin. Selon l'édition 2001 de l'annuaire de l'Encyclopedia Britannica, les musulmans représenteraient environ 16% de la population aujourd'hui. L'appartenance à l'Organisation de la Conférence Islamique aurait également eu quelques retombées favorables pour l'Ouganda, rappelle New Vision: sur le plan économique (prêts avantageux et soutien à des projets), mais aussi sur le plan politique (assistance pour les pourparlers entre l'Ouganda et le Soudan). "C'est un privilège d'appartenir à l'OCI", déclare un haut fonctionnaire du Ministère des affaires étrangères, en affirmant que d'autres pays ont essayé d'y entrer sans y parvenir, mais en ajoutant que l'appartenance de l'Ouganda poursuit des intérêts purement économiques.
Il ne reste rien des Bouddhas de Bamian, en Afghanistan, indique la BBC (1er mars 2002), qui relate des observations du spécialiste suisse Paul Bucherer. Ces gigantesques statues (la plus grande avait 53m de haut) avaient été détruites à l'initiative du gouvernement taliban au mois de février 2001, suscitant une vague de protestations internationales en raison de cette atteinte au patrimoine culturel de l'humanité, mais aussi l'indignation de croyants bouddhistes. "La destruction a été faite de façon très professionnelle", indique Bucherer: il ne subsiste même pas des fragments des statues. L'UNESCO étudie des projets de reconstruction.
Le Vatican semble durcir le ton face à l'Eglise orthodoxe russe. C'est en tout cas ce que suggère le titre d'un article de la correspondante moscovite du Keston Institute, Geraldine Fagan, publié par le Wall Street Journal (25 février 2002). Il s'agit bien sûr de la décision de Rome d'ériger en diocèses les quatre "administrations apostoliques" qui couvraient la Russie. Certes, les relations étaient déjà tumultueuses ces dernières années, mais elles se sont tendues un peu plus. Les autorités de l'Eglise russe voient derrière les initiatives romaines des projets de conversion de la Russie. Pourquoi l'Eglise romaine semble-t-elle soudain devenir moins prudente, puisqu'elle ne pouvait ignorer les réactions qu'entraînerait sa dernière décision? Selon l'analyse de l'article, probablement parce qu'on a le sentiment à Rome que le Kremlin ne va pas se joindre à une contre-attaque. Les liens entre l'Eglise et le pouvoir post-soviétique montreraient quelques indices de tension, même si le président Poutine visite occasionnellement des églises. Dans un récent entretien avec le journal polonais Gazeta Wyborcza, le Président a même évoqué son "cher espoir" de recevoir un jour la visite du Pape. Il exercerait une pression dans ce sens sur le patriarche Alexis II. Dans l'immédiat, l'annonce que le Pape dirigerait la prière d'un groupe de catholiques moscovites par liaison satellite (en même temps que dans cinq autres villes du monde) a suscité de nouvelles irritations de la part de l'Eglise russe. Le patriarche Alexis a comparé cet usage de technologies modernes à une "invasion de la Russie", rapporte l'agence Reuters (2 mars 2002). Cette prière par liaison vidéo s'est déroulée le 2 mars 2002.
L'Eglise orthodoxe prend le chemin de l'Antarctique: il ne s'agit pas d'une nouvelle émigration, mais de la construction de la première église orthodoxe dans l'Antarctique, que nous révèle le Moscow Times (22 février 2002). La future église, dédiée à Saint Nicolas, accueillera la poignée de chercheurs russes qui résident à la base de Bellinshausen, sur l'île du Roi Georges, mais servira aussi de mémorial aux 47 Russes qui ont été enterrés sur ce continent au cours de décennies d'exploration. Le site a déjà été béni, et une croix y a été plantée. L'église, haute de 12 mètres, sera construite en bois de l'Altai, dans un style traditionnel russe. Une fondation a été créée en juillet 2000, et des hommes d'affaires contribuent aux coûts. Si tout se déroule bien, la construction pourrait être achevée en mars 2003.
Des escarmouches entre hindous et catholiques à l'île Maurice - purement verbales, mais vives! Il faut dire que le dernier incident s'inscrit dans une série de tensions entre le gouvernement et l'Eglise catholique depuis plusieurs mois, tensions qui ont notamment tourné autour de la réforme du système éducatif et de la liberté d'action des écoles catholiques. Le dernier éclat est parti de déclarations du P. Henri Souchon, prêtre apparemment connu pour son franc-parler. Dans un entretien accordé à l'hebdomadaire de Beau-Bassin 5-Plus Dimanche (17 février 2002), le P. Souchon épluchait les statistiques religieuses mauriciennes des trente dernières années. Celles-ci indiquent une baisse du nombre de catholiques (29,7% de la population en 1972, 23,6% en l'an 2000), attribuée à différentes causes (qui vont de l'émigration à l'attrait du pentecôtisme). Tous les groupes chrétiens réunis représentent 32,2% de la population. Le pourcentage des hindous a également décru, mais plus modestement: il est passé de 51,6% en 1972 à 49,6% en 2000. "[...] ces chiffres vont toucher la politique", affirmait le P. Souchon: n'étant plus majoritaires, les hindous ne devraient plus prétendre avoir droit automatiquement à un Premier ministre ou à d'autres postes importants. Le Front commun hindou, rassemblant les représentants d'une quinzaine des principales associations hindoues, a vivement réagi et a organisé une conférence de presse le 21 février 2002, rapporte Le Mauricien (22 février 2002). Le Front hindou conteste que la communauté ait de telles prétentions ou vote en bloc. Le Front considère ces déclarations comme une provocation, une ingérence dans les affaires de la communauté hindoue (le P. Souchon avait émis des critiques sur certains aspects de la vie religieuse de celle-ci) et une atteinte à la bonne entente entre les communautés de l'île. Dans une lettre du 28 février, l'Evêché de Port-Louis a déclaré que "tout commentaire ayant trait aux religions doit être circonspect" dans un pays aux communautés aussi diverses que l'île Maurice et que le P. Souchon "parlait en son nom propre", sans engager l'Eglise (Le Mauricien, 1er mars 2002).
Peut-on être catholique et franc-maçon? Une question qui suscite souvent des controverses. Pour Mgr Henri Brincard, évêque du Puy en Velay (France), la réponse ne fait pas de doute: "Je réponds clairement: non!", explique-t-il dans un entretien publié sur le site Web de son diocèse. Il rappelle la déclaration du 26 novembre 1983 de la Congrégation pour la doctrine de la foi, signée par le cardinal Ratzinger, qui rappelait que "le jugement négatif de l'Eglise sur les associations maçonniques demeure inchangé". Mgr Brincard recense trois principaux points de divergence: la franc-maçonnerie prône le relativisme doctrinal (pas de certitude quant aux vérités profondes concernant l'homme et sa destinée); elle refuse toute idée de salut (l'homme se construit par lui-même, sans avoir besoin de Dieu pour le changer); le secret maçonnique n'a jamais été accepté par l'Eglise.
L'intérêt pour l'islam augmente aux Etats-Unis. L'une des conséquences des événements du 11 septembre est que les Américains (et pas seulement eux) cherchent à mieux connaître cette religion (comme nous l'avions déjà mentionné dans notre rétrospective sur les religions en 2001). Cela signifie aussi que les cours sur l'islam attirent un nombre sans précédent d'étudiants dans les universités américaines: il est fréquent que le nombre d'étudiants qui assistent à ces cours ait doublé depuis le mois de septembre 2001. Les responsables de l'Université de Californie à Davis observent que la moitié de ces étudiants sont des musulmans, qui souhaitent mieux s'informer sur leurs racines. Certains préféreraient cependant avoir un professeur musulman (ce qui est loin d'être toujours le cas dans les cours d'islamologie). Au-delà des événements immédiats qui motivent cette vague d'intérêt, il faut y voir aussi un indice de la place plus importante que tendent à occuper les thèmes religieux dans les universités américaines, comme le souligne un article (en anglais) de Mark Clayton sur ce site.
La sélection d'un nouvel archevêque de Canterbury est l'occasion de soulever des questions sur l'avenir de l'Eglise anglicane. Comme le souligne le numéro de février 2002 de la lettre d'information Religion Watch, le choix du nouveau primat de la Communion anglicane (73 millions de fidèles) reviendra en dernier ressort au Premier ministre, sur la base du choix de deux candidats par une commission de 13 membres, dont le président sera nommé par Tony Blair. De plus en plus de Britanniques sont critiques face au rôle joué par un homme politique dans la désignation d'un chef d'Eglise. Cela pose plus généralement la question de la relation spéciale entre Eglise d'Angleterre et Etat. Une majorité des citoyens ne se montrent plus favorables à ce statut privilégié. Une autre question évoquée est celle du rôle des autres Eglises de la Communion anglicane dans le choix de leur primat. Il y a en effet 37 Eglises anglicanes étrangères, qui ne jouent aucun rôle dans le processus de sélection, bien que la vitalité de cette tradition chrétienne se manifeste principalement en dehors des Iles britanniques. Un premier pas pourrait être l'élection d'un évêque d'origine non anglaise: l'un des candidats déclarés est Mgr Michael Nazir-Ali, d'origine pakistanaise. Le célèbre archevêque sud-africain Desmond Tutu a appelé l'Eglise d'Angleterre à envisager l'élection d'un évêque non anglais (The Times, 25 février 2002). A ce stade, les jeux sont cependant encore loin d'être faits.
En Libye, 86 personnes ont été condamnées pour appartenance aux Frères musulmans. Deux d'entre eux ont été condamnés à mort, lors du jugement rendu le 16 février 2002, 73 autres à la prison à vie et 11 à 10 ans d'emprisonnement. Selon un communiqué de presse d'Amnesty International (18 février 2002), le procès s'est tenu dans des conditions contestables. Les deux condamnés à mort sont Salem Abu Hanak (né en 1956), ancien chef du Département de chimie de la Faculté des sciences de l'Université de Qar Younes (Benghazi), et Abdullah Ahmed Izzedin (né en 1950), un ingénieur et chargé de cours à l'Université de Tripoli. Le groupe auquel ils étaient accusés d'appartenir est connu à la fois sous le nom de Frères musulmans et sous celui de Groupe islamique libyen (al-Jama'a al-Islamiya al-Libiya). Cette affaire rappelle la présence de courants islamistes en Libye, où ils font l'objet d'une sévère répression.
Une affaire de foulard islamique à Singapour: la loi de Singapour interdit le port de symboles religieux dans les écoles, mais des parents ont envoyé leurs filles à l'école primaire coiffées du foulard islamique traditionnel, dans un contexte où le gouvernement est particulièrement nerveux par rapport aux signes d'activisme islamiste. Elles ont donc été exclues de l'école tant qu'elles persisteraient à porter le foulard, appelétudung par les musulmans malais. Environ 450.000 Malaisiens résident à Singapour, et la plupart d'entre eux sont musulmans; ils appartiennent aux classes les moins privilégiées de la population. La décision suscite un débat: d'un côté, des activistes musulmans soulignent que la confiance que souhaite établir le gouvernement doit reposer sur le respect des coutumes de l'autre; à l'inverse, le Premier ministre estime que l'école doit être un espace dans lequel se crée une identité commune, tandis que le port de symboles religieux créerait une polarisation. Cela dit, souligne un diplomate occidental anonyme cité par le New York Times (2 mars 2002), alors que le gouvernement se soucie beaucoup de promouvoir l'harmonie entre les différents groupes après l'arrestation d'islamistes radicaux au mois de décembre 2001, cette affaire risque de "créer un sujet symbolique susceptible d'unir même les musulmans modérés". Les principales organisations musulmanes de Singapour ont cependant réagi avec modération. L'agence IPS (22 février 2002) indique que la Malaisie pourrait accueillir dans ses écoles les fillettes exclues. La décision de Singapour est très critiquée en Malaisie voisine, où la majorité des écolières portent le tudung.
Plus de 1.200.000 exemplaires du Coran ont été distribués par l'Arabie saoudite aux pèlerins venus à La Mecque. Des instructions ont été données pour que tout pèlerin quittant le Royaume puisse recevoir une traduction du Coran dans sa langue, rapporte Ain Al Yaqeen (1er mars 2002), magazine hebdomadaire arabe publié sur Internet. C'est une occasion pour l'hebdomadaire de souligner les efforts de longue haleine de la monarchie saoudienne pour diffuser le Livre saint à travers le monde. Mais ces efforts ne se limitent pas à la distribution du Coran, comme le montre le bilan dressé: "quelque 210 centres islamiques à travers le monde sont financés partiellement ou entièrement par l'Arabie saoudite, plus de 1.500 mosquées et 202 collèges et près de 2.000 écoles pour éduquer les enfants musulmans dans des pays non islamiques". Sur plusieurs pages, le magazine fournit une liste d'exemples de centres ou mosquées subventionnés par les Saoudiens, du Mali au Japon, du Canada à l'Australie. En Europe, sont cités notamment le centre culturel de Bruxelles, qui aurait reçu un soutien total de 19 millions de riyals (5,8 millions d'euros), le Centre islamique de Genève, qui reçoit annuellement un montant équivalent (soit plus de 8,5 millions de francs suisses), le Centre islamique de Madrid, qui a reçu un soutien total de 27 millions de riyals (8,3 millions d'euros). Des mosquées ont également bénéficié des largesses saoudiennes: un don de 11 millions de riyals (3,3 millions d'euros) pour la mosquée de Lyon, par exemple. La famille royale saoudienne a également permis financièrement l'établissement de plusieurs chaires universitaires sur l'islam (à l'Université de Californie à Santa Barbara, à la School of Oriental and African Studies à Londres...). Des académies islamiques sont également créées, dont l'une à Moscou. Sans oublier le rôle de la Ligue musulmane mondiale, soutenue par l'Arabie saoudite.
A la fin du mois de janvier ont été rendus publics les premiers résultats du recensement fédéral suisse de décembre 2002: ils fournissent d'intéressantes indications sur les statistiques religieuses de la Suisse. En effet, la question de l'appartenance religieuse figure toujours dans les recensements helvétiques. De 1990 à 2000, la population de la Suisse a augmenté de 5,9%: le total est maintenant de 7.280.000 habitants. L'apport migratoire joue un rôle important - et contribue à modifier la carte religieuse de la Suisse. Sur le continent européen, seules l'Allemagne, l'Autriche et la Grèce dépassent le "gain migratoire international" (pour parler la langue des démographes) de la Suisse. La proportion d'étrangers en Suisse atteint 20,5% - et il s'agit d'une population en moyenne plus jeune que la population de nationalité suisse (parmi les personnes de 20 à 39 ans, plus d'une sur quatre est de nationalité étrangère). La composition de cette population étrangère s'est transformée: plus d'un étranger sur quatre est originaire d'un Etat de l'ancienne Yougoslavie! L'érosion s'est poursuivie pour les Eglises traditionnelles de la Suisse: 44% de catholiques romains (grâce à l'apport migratoire en provenance de pays à majorité catholique, comme le Portugal), 37% de protestants (Eglises libres comprises). Comme on s'y attendait, l'accroissement des personnes déclarant n'appartenir à aucune religion est rapide: de 7,4% en 1990 à 12% en 2000. Le nombre de musulmans a doublé en dix ans: de 152.200 à 310.000 (principales origines: Balkans et Turquie). L'islam (toutes tendances confondues) est maintenant la troisième confession de la Suisse. 40.000 de ces musulmans environ sont détenteurs d'un passeport suisse (7.700 en 1990), la moitié par naturalisation et l'autre moitié de naissance. Quant aux orthodoxes, les flux migratoires balkaniques ont également entraîné leur augmentation (130.000).
Ces notes ont été rédigées par Jean-François Mayer.