Pourtant, si la blogosphère islamiste n’a rien inventé, elle est plus qu’une fenêtre sur cour islamiste. Elle constitue bien un miroir privilégié des transformations du rapport au religieux et au politique, mais elle est autant productrice que reflet du réel social et politique.
Dans le cas présent, elle participe au renforcement d’une nouvelle tension au sein de la confrérie entre un courant protectionniste dans son rapport à l’organisation, le courant du tanzim, et un nouvel esprit militant marqué par le par un «concordisme» (tawfiqiyya) politique et culturel, c’est-à-dire l’acceptation de l’ouverture sur le champ politique, sur les acteurs non religieux de la société civile et sur les références culturelles non islamiques et en rupture avec la militance martiale prônée et organisée en « institutions totalitaires » au sens de Goffman.
La blogosphère islamiste est, à l’origine, produite par le haut et est conforme à la culture militante traditionnelle. Mais le blog va, comme d’autres expressions de la culture militante frériste, se faire réapproprier par le bas et subir une inflexion individualiste. Il relègue les grandes causes collectives à la périphérie et leur substitue une attention centrale donnée aux humeurs et aux subjectivités de ses fondateurs. Il va ensuite nourrir un clash de cultures militantes avant de finalement créer un conflit ouvert au sein de l’organisation. À ce titre la petite histoire de la blogosphère islamiste témoigne à la fois des tensions au sein de l’islamisme et du rôle déterminant des nouvelles technologies dans les mutations du rapport au religieux et à la militance.
Pour lire le texte intégral de cette étude inédite de Patrick Haenni, fondée sur des recherches de terrain récentes, veuillez voir le document ci-dessous ou télécharger le texte complet au format PDF (14 pages, 320 Ko).